J’ai heureusement fait évoluer mon approche du design en laissant désormais une grande place aux questions. Je ne le faisais pas auparavant, sans doute par peur de paraître stupide. Je n’avais jamais appris à poser des questions. Mon parcours scolaire m’a surtout dicté ce que je devais apprendre. Et il me récompensait lorsque j’avais plus de réponses que de questions. Une approche pas très adaptée à la réalité du monde pro 😄.
Ce n’est qu’une question de questions
Dans son livre The Principles, Ray Dalio décrit les personnes qui ont plus de réponses que de questions comme dangereuses. Dangereuses pour elles-mêmes et les autres car elles ont tendance à voir la réalité d’un seul point de vue.
Néanmoins, dans de nombreux cas, il existe de multiples réalités. Et pour les trouver, la meilleure manière reste de poser des questions. Plus vous en poserez, plus vous serez en mesure d’élargir votre perception des choses. Ce n’est qu’une question de questions.
perspective pic.twitter.com/eeSilHIhmy
— Vala Afshar (@ValaAfshar) 18 décembre 2016
A mon sens, l’expertise d’un designer passe avant tout par la qualité de ses questions. C’est pour cette raison que j’ai adopté un nouveau process lorsque je dois prototyper une expérience Web. Une approche où les questions permettent de découvrir l’objectif prioritaire, les problèmes à affronter, leurs racines, le plan nécessaire pour les éradiquer et au final, atteindre l’objectif fixé. Rien de magique, juste du bon sens.
1. Prototyper en étant optimiste et pessimiste
Je débute toujours un nouveau projet par 2 questions. La première question que je pose au commanditaire prend généralement cette forme : Imaginez un futur optimiste, comment définiriez-vous votre succès dans 6 mois ? Pourquoi ? Cela me permet d’identifier ses attentes et de bien cerner ses indicateurs de succès.
La deuxième question prend cette forme : Imaginez le pire scénario. Quels seraient les obstacles les plus probables sur la route de votre succès ? Pourquoi ? La discussion qui s’en suit permet d’identifier les zones d’ombres, les problématiques aux contours flous, les doutes, et les sources potentielles d’échecs.
Avec ces informations, le périmètre du projet est désormais plus clair. Ses challenges et ses risques sont identifiés de manière plus précise.
Nul besoin de faire voler à 20 000 mètres d’altitude un planneur stratégique. Cette approche optimiste et pessimiste est suffisante pour entamer un échange concret. Elles servent de cadre pour les prises de décision.
Questions à poser :
- Définition du succès ? Pourquoi ?
- Source prioritaire d’échecs ? Pourquoi, quelles sont les causes ?
Outils : une boisson chaude, un tableau Velleda et des feutres.
2. Déterminer l’expérience à prototyper
Une expérience en ligne peut se décliner en mille et un parcours. Pour y voir un peu plus clair, commencez par déterminer la valeur ajoutée du projet.
- Qu’a-t-il à offrir aux potentiels utilisateurs, quelle est sa principale mission ? Ex. : personnaliser une chaussure, acheter une plante verte, des places de concert.
Déterminez ensuite vos cibles prioritaires d’utilisateurs en questionnant le sponsor du projet. Quelles connaissances a-t-il de sa base d’utilisateurs.
- Leurs besoins ?
- Leurs objectifs ?
- Leurs contraintes ?
Aidez-vous des segments présents au sein des outils d’analyses tels que Google Analytics, Mixpanel ou Hotjar. Ils sont utiles pour déterminer les catégories et les sources d’utilisateurs qui ont le plus de valeur pour le projet.
Attardez-vous sur les données démographiques uniquement si elles sont rapportées à des données de performances. Ex. : revenus moyen par utilisateur 25-35 ans/France : 26 EUR. Cela vous évitera de collectionner des infos sur lesquelles on ne peut pas acter.
L’article à lire pour aller plus loin dans l’analyse de données : AARRR! Mixpanel for Pirates.
Si vous avez un peu de budget, n’hésitez pas à faire vos propres recherches et à interviewer des utilisateurs afin de mieux cerner leurs besoins et leurs contraintes. Aidez-vous du guide Trello créé par la team Pivtal pour structurer votre démarche de recherche UX.
Questionnez également le service commercial et le support client à propos des difficultés qu’ils rencontrent dans leur process de vente. Détectez aussi les tendances dans les feedbacks utilisateurs. Ces témoignages sont utiles pour comprendre le contexte d’un projet et l’origine des problématiques.
Une fois vos utilisateurs cibles et la promesse du projet identifiés, notez-les sur un tableau blanc.
Questions à poser :
- Quelle est la valeur ajoutée du dispositif ? Sa promesse ? – Ex. : je peux personnaliser une paire de chaussure ;
- Quelles sont les sources et les catégories principales d’utilisateurs ? – Besoins, objectifs, contraintes ;
Outils : une boisson chaude, un tableau Velleda et des feutres.
Vous avez maintenant une connaissance plus approfondie des utilisateurs cibles et de la promesse du projet. Il ne reste plus qu’à identifier les étapes du parcours permettant à l’utilisateur d’atteindre son objectif. C’est notre 3ème point.
3. Un parcours utilisateur par prototype
Je réussis mieux mes prototypes lorsque le périmètre du projet est centré sur un seul parcours utilisateur. Par exemple : un parcours de recherche plus fluide, un système de réservation plus performant, etc. La priorisation permet de concentrer son énergie sur un problème à la fois.
Mon conseil si on vous demande de concevoir un site ecommerce complet au sein d’un unique prototype : dites non. Privilégiez la création d’un prototype par parcours utilisateur. Le fait de découper le projet en segments plus petits permet de concentrer les discussions sur le sujet essentiel du moment.
Sérieusement ! Ne pas savoir dire non est le fléau du XXIème siècle. La mission du designer ne consiste pas à faire plus en moins de temps. Il s’agit d’obtenir seulement le meilleur de chaque opportunité. Ce n’est pas une stratégie de gestion du temps, ni une technique de productivité qui sauvera votre emploi du temps. Dites simplement non et concentrez-vous sur l’essentiel.
Practice saying no. “Productivity tips, tricks, and hacks” are all about managing what happens when you say yes to too many things…
— Jason Fried (@jasonfried) 14 décembre 2016
Livre recommandé : Essentialism: The Disciplined Pursuit of Less
Cette nécessité de prioriser passe par la sélection des étapes clés d’un parcours utilisateur. Choisissez-les en posant cette question :
- Quelle étape ou quel ensemble d’étapes représente le plus grand challenge pour l’utilisateur et pour le projet ? Ex. : parcours du choix des couleurs/matériaux pour personnaliser ma paire de chaussures.
La conception d’un prototype permet de prendre un maximum de risques avec un coût réduit. C’est le moment de se mettre en danger en choisissant un challenge ambitieux. La corrélation n’est pas parfaite mais plus la prise de risque sera importante, plus les apprentissages issus du prototype seront intéressants.
Donc, choisissez un parcours utilisateur prioritaire et schématisez ses étapes sur un tableau Velleda.
Ne vous en faites pas pour les parcours secondaires. Ils pourront faire l’objet d’une autre période de réflexion en temps 2. Leur mise en scène peut également s’inspirer des solutions imaginées pour le parcours prioritaire.
Questions à poser :
- Quel enchaînement d’actions l’utilisateur doit-il réaliser pour être en mesure de satisfaire son besoin ? – Ces actions constituent les parcours.
- Quel parcours représente le plus grand challenge pour le projet ?
Outils : une boisson chaude, un tableau Velleda et des feutres.
4. Mettre en scène le parcours utilisateurs
Accordez-vous un temps de réflexion avant de vous lancer dans la conception des interfaces de votre proto.
Une des solutions qui fonctionne le mieux pour moi est de débuter la réflexion par une série de croquis papier. Nul besoin d’être un artiste. Quelques tracés, une ébauche des titres et des messages principaux par écran suffiront à donner un premier aperçu de vos intentions. Collectez un maximum de feedbacks sur ces croquis de la part de votre team projet. Réalisez si besoin 2 ou 3 itérations.
Si vous avez besoin de faire un bench, trouvez l’inspiration en explorant le showcase d’UI design et les collections privées 👓 du MDW. You’re welcome 😄.
Question à poser :
- Quels éléments de design sont nécessaires pour mettre en scène le parcours utilisateur prioritaire ? – Vos écrans et vos pages utiles pour compléter le parcours.
Outils : des feuilles A4 et des feutres. Arrêtez le café, c’est votre 4ème tasse 😙…
Astuce : pour vos croquis, utilisez des postit rectangulaires pour symboliser un écran desktop (postit à l’horizontale) ou un écran de téléphone mobile (postit à la verticale). Collez 2 à 3 postit sur les feuilles A4. Cela sera plus pratique pour manipuler les croquis.
5. Prototyper la solution gagnante
Transformez vos croquis papier en prototype HD grâce à votre outil préféré.
L’outil idéal de prototypage doit vous offrir un moyen rapide de mise en scène des différents composants de design. Une fonctionnalité pour créer un lien entre chaque écran est également la bienvenue. Les liens permettront de rendre votre proto plus réaliste en fluidifiant les transitions entre chaque écran.
Une fois le prototype prêt, challengez-le avec l’équipe projet puis testez-le auprès d’utilisateurs répondants à des critères représentatifs de votre cible. Pour déterminer les critères de recrutement des participants, servez-vous de vos personas de l’étape 2.
L’objectif des tests utilisateur est d’identifier des tendances dans les feedbacks. Par exemple : actions et parcours non anticipés, wordings obscures, etc.
Capturez, synthétisez, priorisez ces apprentissages. Puis préparer une nouvelle itération de votre prototype prenant en compte les changements souhaités. Recommencez autant de fois que nécessaire. Cela vous aidera à y voir plus clair dans votre roadmap.
Questions à poser :
- Quelles sont les tendances positives et négatives dans les apprentissages provenant des tests utilisateurs ?
- Quelles corrections doivent être prioritairement mises en place suite aux tests ? A déterminer en fonction de la valeur ajoutée perçue pour l’utilisateur, de la faisabilité technique et du coût des correctifs.
La finalité de cet article
Cet article a été rédigé afin de réaffirmer le fait qu’il n’y a pas de questions bêtes. Il y a seulement des réponses idiotes. Ne faîtes pas comme moi, n’attendez pas 4 ans pour poser les bonnes questions. En tant que designer, bombardez votre interlocuteur de demandes afin de bien cerner le contexte et les enjeux de son projet. Ne vous fiez pas qu’à votre intuition et à ce qui est dit d’emblée. Creusez le sujet, le travail d’un designer partage de nombreux points communs avec celui d’un reporter. Allez chercher les réponses là où elles se trouvent.
Ressources pour optimiser son process de design :
Supporté par Pidoco
Chez Pidoco, nous croyons que le design est essentiel à la réussite d’un projet. C’est pourquoi nous sommes fiers de soutenir MDW dans son effort pour défendre et promouvoir une large communauté de créateurs.
A l’instar d’autres outils de création de prototype, Pidoco propose l’essentiel des fonctionnalités pour mettre en scène de manière interactive vos solutions d’interfaces. Que ce soit pour un site Internet ou une application mobile, Pidoco offre :
- Un système de templates et de composants par défaut afin d’accélèrer le processus de création. Des formulaires, des blocs de navigation et d’autres éléments sont disponibles dans une bibliothèque. Vous pouvez également ajouter des éléments personnalisés.
- Pidoco propose un système de liens et d’interactions entre chaque écran.
- Les fonctionnalités de collaboration et de commentaire en temps réel permettent d’enrichir rapidement le processus de création.
Découvrez la nouvelle version de cet outil de création de wireframes et de prototypes HD en visitant la landing page de Pidoco.
Si vous avez apprécié cet article, vous pourriez être intéressé(e) par :
— Guillaume du Magazine du Webdesign.
Accédez au meilleur des interfaces directement depuis votre boîte mail
Si vous n’aimez pas les emails, accédez au meilleur des interfaces sur Twitter.